ARCHIVES DES CHASSES — CHASSES MSN PAR MAX VALENTIN


LA  BOURSE  DE  SAINTOYAND

 

| Fiction | Carnet de voyage | Chronologie | Solution officielle |

 

Note liminaire :
Cette deuxième chasse de Max Valentin sur MSN fut mise en ligne fin février 1997. Le trésor fut découvert le 11 avril suivant. Le matériel fourni aux chasseurs comprenait la désormais classique fiction introductive destinée à situer l’action (et à introduire plusieurs fausses pistes), et le « carnet de voyage » crypté de Louis Saintoyand. J’y ai ajouté un résumé de la chronologie des événements ainsi que, bien sûr, les solutions officielles de Max Valentin, telles qu’elles furent mises en ligne sur MSN, et que j’ai agrémentées de quelques brefs commentaires. Bien entendu, le site incluait également une « machine logique » permettant aux chasseurs de saisir leurs réponses, à savoir les 10 villes composant le périple de Louis Saintoyand. Cette chasse présentait l’originalité de dévoiler « en clair » dans l’énigme la « super-solution », c’est-à-dire l’emplacement exact de la cache, la nature du repère pérenne (une croix) et les mesures à prendre sur le terrain pour y accéder. Quant à savoir de quelle croix il s’agissait, c’était bien sûr une autre paire de manches…

 

1. La fiction

Tout ce que mon enquête me permit d’apprendre au sujet de ce personnage, c’est qu’il s’appelait Rifke, qu’il était né à Hanovre en 1847 et demeurait 491 avenue de Versailles à Paris. Le jour de la déclaration de guerre, il quitta la capitale française et s’installa dans un garni, 80 boulevard du Midi à Bruxelles. C’est là que, deux semaines plus tard, il se suicida en se pendant à une espagnolette, laissant sur une table trois mille francs qu’il léguait à la Croix Rouge belge. À sa manière, ce francophile fut happé par la tourmente de la Grande Guerre.

Mais avant d’aller plus loin, il faut que je relate les circonstances dans lesquelles je suis entré en possession de la lettre (ou plutôt du fragment de lettre) que cet homme avait écrite, dans un français hésitant, et qu’il avait offerte à un ami de rencontre, Louis Saintoyand, avant de quitter Paris. Saintoyand, un homme d’une cinquantaine d’années, était marchand d’étoffes de son état. Les deux hommes avaient fait connaissance dans une brasserie du quinzième arrondissement, et avaient sympathisé.

Oh, bien sûr, j’avais déjà entendu parler de ces fameuses « lettres de Jérusalem », vastes escroqueries dont furent victimes, depuis l’époque des Croisades, des milliers de naïfs mus par la cupidité. C’est en utilisant ce stratagème que d’astucieux faussaires, prétextant un pressant besoin d’argent ou une impossibilité de se déplacer, appâtaient des gobe-mouches à la cervelle aussi creuse que leur bourse était rebondie, et proposaient de leur vendre le plan d’un trésor fantaisiste !... Mais là, il ne s’agissait sûrement pas d’un faux: ce Rifke, en effet, n’avait pas vendu son plan à Saintoyand, mais le lui avait donné sans contrepartie, ce qui laisse supposer qu’il était honnête et que ce trésor existait vraiment.

Je ne possède pas l’intégralité de cette fameuse lettre, et je pense que, par prudence, Louis Saintoyand l’a détruite... Mais j’ai réussi à mettre la main sur les carnets de voyage de ce dernier, et parmi ses notes figure le fameux fragment qu’il avait conservé. Ce papier indique l’emplacement de la bourse cachée par Rifke, bourse qui contient soixante pièces d’or. Voici ce que dit ce fragment :

« (...) de cette croix, il faut marcher cinq grands pas vers l’arbre qui se trouve sur son côté droit quand on a le dos au chemin. J’ai mis le petit sac avec les pièces d’or derrière dans un trou entre ses racines, et j’ai bien bouché avec de la terre. »

Hélas, comme on le voit, si ce fragment parle avec précision d’une croix et d’un arbre, il ne révèle rien de la région où ils se trouvent. Cette description pourrait donc concerner des centaines, voire des milliers d’endroits en France... En revanche, il doit être possible de reconstituer le périple de Louis Saintoyand à l’aide de son journal de voyage. Je suppose que l’homme attendit que ses pérégrinations commerciales l’amènent non loin du site où cette bourse était cachée. Et il la trouva ! Que se passa-t-il ensuite ? Nul ne sait. Toujours est-il que Saintoyand remit la bourse dans son trou, certainement avec l’intention de la récupérer plus tard.

Évidemment, les étapes de son voyage ne sont pas directement compréhensibles. Prudent—on le comprend—, l’homme resta sibyllin. J’avoue avoir été incapable de reconstituer son parcours qui le mena, muni de ses coupons de tissus, de ville en ville, de drapiers en boutiques de tailleurs, de braderies en foires et en marchés... Mais je suis sûr d’une chose : Saintoyand ne retourna jamais sur les lieux, car il mourut de congestion quelques semaines plus tard, dans un hôpital de Rennes. Voici, fidèlement retranscrit, le contenu du journal de voyage de Louis Saintoyand entre le jour où Rifke lui offrit son plan, et celui où il découvrit le trésor.

| Haut de la page | Suite |

 

2. Le carnet de voyage de Louis Saintoyand

P.
Texte
1
En discutant avec un client, j’ai appris qu’un homme ayant usurpé l’identité d’un grand personnage qui a tenu l’empire de Grèce pendant un an et treize jours, fut arrêté par Everard de Cassenay puis pendu dans la ville que je viens de quitter. Suis resté un jour sur place. Temps maussade. Bonnes ventes.
2
Arrivé dans cette ville qui a hébergé un capitaine, inspirateur d’un vieux dicton local : « Ma fille, ne passe pas les rivières. Sans quoi sous ta cotte, les étrivières ». Suis resté un jour sur place. Temps doux mais couvert. Ventes moyennes.
3
Ai passé deux jours chez ma mère. Repos.
4
À nouveau en route. Dans ce qui allait devenir les faubourgs de cette ville, un laboureur a trouvé en 1746 un coffret de fer contenant trois statuettes en bronze représentant Mars, Pallas et Hercule. Suis resté un jour. Beau temps, bonnes ventes.
5
Arrivé dans cette ville, me suis promené entre la Fontaine d’Adam et Ève et la Maison des Consuls. Suis resté un jour. Beau temps, marché pas très animé mais bonnes ventes.
6
En route pour cette ville qui possédait une tour dont une porte était surmontée d’un serpent ailé et doré, détruite en 1622. Suis resté deux jours. Beau temps, ventes moyennes.
7
Ai reçu une lettre de ma mère et suis allé la voir. Ai passé deux jours en sa compagnie. Ni sa santé ni son moral ne sont bons. Je crains qu’elle nous quitte bientôt pour le petit cimetière où, depuis toujours, les Saintoyand trouvent le repos éternel. Quelle tristesse !
8
Ai repris la route. Ai passé un jour dans cette ville où un chapiteau montre un ange chassant Adam du paradis terrestre en le tirant par la barbe. Mais Adam, estimant n’être pas seul coupable, agrippe Ève par les cheveux pour l’entraîner avec lui dans la déchéance. Beaucoup d’effervescence dans les rues, beaucoup de nervosité. Temps chaud. Ventes médiocres.
9
Arrivé dans cette ville où fut signée une trêve fatale à Olivier de Clisson, mais bénéfique à Jean de Montfort. Suis resté un jour. Beau temps. Vu un drapier et deux tailleurs. Très grande nervosité. Les gens sont soit exaltés, soit abattus. Ventes médiocres.
10
Suis dans la région depuis sept jours, et n’ai rien pu faire. Mais aujourd’hui 19 septembre à dix heures, j’ai enfin pu me rendre sur place et j’ai trouvé la croix, l’arbre et la bourse ! C’était de la folie, et je l’ai laissée dans son trou, que j’ai bien rebouché. Je prends quelques minutes pour rédiger ces lignes. Depuis ma rencontre avec Rifke (je pense souvent à lui et me demande ce qu’il est devenu), j’ai parcouru de grandes distances, parfois dans des conditions difficiles... J’ai hâte de revoir ma mère. Que ne suis-je un oiseau: à la vitesse moyenne d’un pigeon voyageur, il ne me faudrait guère que six heures et quarante minutes pour la retrouver. Elle doit avoir bien besoin de moi. Y arriverai-je ? Dieu seul le sait.

| Haut de la page | Suite|

 

3. Reconstitution chronologique des voyages de Saintoyand (août-septembre 1914)

Juillet (?) 1914 Rifke et Saintoyand sont à Paris.
3 août L’Allemagne déclare la guerre à la France. Rifke quitte Paris pour Bruxelles.
17 août Rifke se suicide à Bruxelles.
1er septembre Saintoyand vient de quitter Lille.
2 septembre Saintoyand arrive à Avallon.
3-4 septembre Repos chez sa mère, à Saint-Claude.
5 septembre Saintoyand est à Louhans.
6 septembre Saintoyand est à Riom.
7-8 septembre Saintoyand est à Lusignan.
9-10 septembre Repos chez sa mère, à Saint-Claude.
11 septembre Saintoyand est à Clermont-Ferrand.
12 septembre Saintoyand est à Malestroit.
13 septembre Saintoyand arrive « dans la région » mais ne « peut rien faire ».
19 septembre Saintoyand « peut enfin se rendre sur place » et découvre le trésor à 10 heures.

| Haut de la page | Suite |

 

4. Solution officielle

Note liminaire :
Voici les solutions (succinctes !) de La Bourse de Saintoyand, écrites par Max Valentin et mises en ligne sur MSN après la découverte du trésor.

Le personnage de Rifke a réellement existé, et il est mort dans les circonstances décrites très exactement dans le récit.

1ère étape :
Le grand personnage est le comte Baudouin de Flandre, et son usurpateur est Bertrand de Rais. Ce dernier fut pendu devant la Halle échevinale de Lille.

2ème étape :
Avallon, dont le commandement fut confié par le roi Charles VII à Jacques d’Épailly, dit « capitaine Fort-Epice ». A la tête de deux cents Nivernais, l’homme se révéla être un couard et un goujat. Les habitants d’Avallon interdirent longtemps à leurs filles d’épouser des Nivernais, d’où ce dicton.

3ème étape :
« Saintoyand » est l’ancien nom des habitants de St Claude, dans le Jura. L’indication principale quant à la localisation de cette étape était donnée par l’allusion, dans le récit, au cimetière.

Commentaire :
Par le plus grand des hasards, il s’est trouvé qu’une recherche sur les sites Web traitant d’onomastique produisait, pour la requête « Saintoyand », exactement le résultat recherché, à savoir Saint-Claude. Sur un site Web traitant d’onomastique (qui existe toujours à cette adresse), on trouvait en effet l’information suivante : « Parfois les variantes orthographiques sont minimes mais il arrive aussi que le nom ait complètement muté, sans aucun lien entre le nom d'origine et le nom actuel. Le patronyme SAINTOYAND rappelle le nom médiéval de Saint-Claude (Jura), mais uniquement pour les érudits locaux. »
Max m’a confirmé après la fin de la chasse que ce n’était certainement pas ainsi qu’il pensait que les chasseurs devaient identifier le lieu de naissance de Louis Saintoyand !

| Haut de la page | Suite |

 

4ème étape : Louhans.

5ème étape : Riom.

6ème étape : Lusignan. La tour était la Tour de Mélusine.

7ème étape : Saint-Claude.

8ème étape : Église Notre-Dame-du-Port à Clermont-Ferrand.

9ème étape :
Malestroit, dans le Morbihan. C’est là que fut signé le Traité de Malestroit entre Philippe VI de Valois et Édouard III d’Angleterre, en janvier 1343.

10ème étape :
Le trésor se trouvait dans la forêt de Beaulieu, au sud-est de Sainte-Menehould, à quelques centaines de mètres au-dessus de l’Ermitage de Rouin. L’arbre qui cachait la bourse se trouvait à cinq mètres à droite de la « Croix de l’Architecte ».

Cette croix marque l’endroit où, jadis, les moines accompagnaient un ermite après l’office religieux, ermite qui s’enfonçait alors dans la forêt. De tout temps, cette croix était en bois, et on la remplaçait lorsqu’elle elle était pourrie. Dans les années soixante, on récupéra dans la région une croix en matériau solide et on décida de la planter définitivement à cet endroit. Elle figure nommément sur les cartes IGN de la région.

C’est dans cette région qu’entre le 12 et le 18 septembre 1914, une contre-offensive alliée à repoussé les lignes allemandes, rendant possible l’accès. Saintoyand veut retourner à Saint-Claude, qui se trouve à 300 km de la forêt domaniale de Beaulieu. La vitesse moyenne d’un pigeon voyageur est de 45 km/h. Cette précision permet d’avoir confirmation de la localisation de cette forêt, à l’extrême sud de la forêt d’Argonne.

Après avoir répondu correctement, le joueur obtenait une question sur son écran : « À vol d’oiseau, combien de kilomètres ont été parcourus par Louis Saintoyand depuis sa rencontre avec Rifke et jusqu’à la découverte de la bourse ? » Évidemment, le périple ne commençait pas à Lille (première ville), mais bien à Paris ou Saintoyand a rencontré Rifke, et se poursuivait par Lille, Avallon, St Claude, Louhans, Riom, Lusignan, St Claude, Clermont-Ferrand, Malestroit et la forêt de Beaulieu.

Le total se situait entre 2882 km et 2915 km selon que les joueurs prenaient leurs mesures en tenant compte des périphéries urbaines ou, au contraire, des centres-villes. Il était donc logique de leur octroyer cette marge, et toute réponse se situant entre 2880 km et 2920 km était acceptée. Si la réponse était fausse (au-dessus ou en dessous de cette fourchette), le joueur obtenait le message suivant : « Désolé, ce n’est pas la réponse attendue...! » Si elle était juste, il obtenait le message suivant : « Bravo, c’est exact ! Avouez que Rifke avait découvert un joli endroit pour y cacher un trésor !... Maintenant à vous de faire les dernières déductions et d’aller le chercher ! »

Le « joli endroit » était bien sûr un petit clin d’œil la forêt de Beaulieu-en-Argonne (« Beau lieu »).

 


Le petit mot de « Louis Saintoyand » enterré avec la contremarque

| Haut de la page | Sommaire des chasses MSN | Homepage |

| Le Testament de Florence B. | Une histoire d’Histoire | Le Trésor venu du futur |